A écouter : le témoignage d'un prof d'histoire en ZEP

Jean-François Chemain

sur la laïcité, l'Eglise, le politique,

l'enseignement, les communautarismes, etc,

ce matin à RND :

 

 

Aujourd'hui professeur d'histoire au collège Louis-Aragon de Vénissieux, Jean-François Chemain a eu une trajectoire hors du commun : consultant international pendant vingt ans, puis converti au catholicisme et décidant – dans la foulée – de se consacrer à enseigner l'histoire aux élèves des ZEP ! Son témoignage est d'un intérêt brûlant, et je suggère à tout le monde d'écouter le podcast de l'émission : ici

 

Ce témoignage vécu mesure la profondeur du problème de la "panne de France" [1] qui bloque, en 2013, l'intégration des enfants d'immigrés en laissant le terrain aux communautarismes. Ainsi par exemple cette élève disant à Chemain : "je ne suis pas française, je suis musulmane" ; ou cet autre élève déclarant la semaine dernière que "Mandela a supprimé l'apartheid en France" :"comme ça ici les Noirs ont pu monter dans les bus des Blancs"... Ce genre de brèves-de-ZEP montrent : a) l'irréalisme des idéo-pédagogies de l'Education nationale, de Luc Ferry à Vincent Peillon ; b) les effets inattendus de la sursaturation médiatique ; c) la difficulté d'enseigner, alors que des élèves - répétant le slogan du grand hypermarché occidental - répondent au professeur que tout est une question d'opinion : "ce qui est la vérité pour vous est une erreur pour moi."

 

Mais le témoignage du prof de Vénissieux n'apporte pas d'eau au moulin récupérateur de la droite identitaire [2]. Le rêve qu'il a exprimé ce matin n'est pas de voir partir les musulmans (ni les immigrés en général) : au contraire, c'est d'ouvrir la connaissance de l'histoire et le patrimoine de la France aux enfants des ZEP ; une France "qui en vaut la peine", selon la formule des évêques français.

 

Par ailleurs, Jean-François Chemain se présente à la fois comme "un homme de droite"... et comme un chrétien catholique qui se laisse toucher et modifier – jusque dans ses réflexes "de droite" – par la parole du Magistère ! Attitude d'une grande loyauté et que nous pouvons applaudir, tant elle est peu partagée aujourd'hui à droite, où l'on ricane tout haut (ou tout bas) des propos de François sur l'économie et la société. [2]

 

La parole du Magistère en tout domaine (y compris l'économie et la société) est inséparable de la Parole divine : celle de l'Esprit-Saint dans l'Eglise, et celle de l'Ecriture. Le professeur de Vénissieux a certainement dans sa serviette l'exhortation apostolique de François ; lisons avec lui le paragraphe 151, qui s'adresse non seulement aux prédicateurs mais à tout chrétien témoin de sa foi :

<< On doit accepter d'être ''blessé'' [= atteint, modifié] d'abord par cette Parole [les Ecritures] qui ''blessera'' [= atteindra, modifiera] les autres, parce que c'est une Parole vivante et efficace qui, comme un glaive ''pénètre jusqu'au point de division de l'âme et de l'esprit, des articulations et des moelles, et peut juger les sentiments et les pensées du coeur '' (Hébreux 4,2). >>

Il y a ainsi une convergence entre ce que disait Jean-François Chemain ce matin à Radio Notre-Dame, et ce qu'écrit un autre enseignant, Patrick J. Dineen, sur un site américain conservateur : voir ici notre note du 10/12.

  

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[1] Le livre de J.F. Chemain montre que la religion chrétienne a dû lutter sans cesse – depuis Constantin – pour ne pas devenir l'outil des pouvoirs politiques : analyse profondément libératrice, et réduisant à néant la fable de "chrétienté" (le mythe d'une société politique amenant chacun à être chrétien) ! Fable que d'autres – qui ne sont pas historiens – tentent de remettre en scène aujourd'hui, comme pour esquiver les directives néo-évangélisatrices de François...

[2] À gauche on zappe les propos de François sur la foi et l'évangélisation, parce qu'on aurait voulu qu'il restaure  l'agnosticisme "catho-progressiste" des années 1970-1980.

  

> On va me reprocher d'utiliser les mots ''droite'' et ''gauche'', en me disant que le Christ est ''au dessus de ça''... Mais le Christ n'est pas ''au dessus'' de l'humain !(c'est même la clé de notre foi). Si des humains se déclarent eux-mêmes ''de droite'' ou ''de gauche'', on doit en tenir compte par égard pour eux – même si ces termes n'ont plus beaucoup de sens en 2013.